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Actualité de l'Andeva, l'association nationale de défense des victimes de l'amiante et autres maladies professionnelles

Rennes : un "serial pollueur" devant la justice

Rennes : un "serial pollueur" devant la justice

13h à Rennes, le 30 avril 2015. Quatre cars viennent de se garer devant la cité judiciaire de Rennes. Plus de deux cent militants venus des différents secteurs de l’Addeva 44 en descendent, parmi lesquels le président actuel, Patrice Hamon, et son prédécesseur, Roland Hottelard.

Roland est satisfait de voir une telle mobilisation sur le sujet relativement nouveau de la prévention. Il a aussi constaté que les gens se sont beaucoup déplacés en couple, ce qui est là encore relativement inédit.

Le cortège s’ébranle et se dirige vers l’entrée du tribunal. Ils sont rapidement rejoints par plusieurs délégations venus d’autres régions. L’Adeva Cherbourg est présente, ainsi que l’Advarm 72 et l’Adeva 76. Tous ont tenu à venir manifester leur solidarité ainsi que leur intérêt pour ce qui va être jugé ce jour-là.

La plainte concerne Mr Daniel Couet, ancien patron de la société de désamiantage et de démolition CDEC à Bain-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine). Celui-ci est accusé d’avoir, « tel le Petit Poucet, essaimé ses déchets d'amiante aux quatre coins du Grand Ouest », comme le dit Michel Ledoux, avocat des parties civiles, qui a réclamé 12 000 euros de dédommagement pour huit anciens salariés. Le parquet a également requis deux ans de prison pour ce « serial pollueur ».

Noella Dourdain, ancienne salariée de l’entreprise concernée est venue assister aux débats en compagnie de deux de ses anciens collègues. Ce sont au final sept anciens salariés de la CDEC sur dix-sept qui se sont joint à la plainte. Pour ceux-là, tout a commencé en 2008, après l’incarcération de Daniel Couet pendant quatre mois, suite à la plainte déposée par l’un de leurs anciens collègues inquiet pour sa santé.

Ils sont ensuite allés se renseigner à l’inspection du travail sur cette situation qu’ils découvraient, puis se sont rapprochés de l’Addeva pour obtenir de l’aide. Consécutivement à cela, une réunion publique a été organisée à Bain de Bretagne avec des bénévoles de l’Addeva en la présence de Michel Ledoux, avocat de l’association. Une jeune journaliste du quotidien « L’éclaireur » en a tiré un long article qui a permis de faire connaitre le sujet.

Dans le même temps, un administrateur judiciaire a été nommé et tous les salariés ont dû être auditionnés. La liquidation définitive de l’entreprise a été prononcée en février 2009.

Depuis il faut bien reconnaitre que la médiatisation n’a pas été à la hauteur. Une émission envisagée pour « Envoyé spécial » n’a finalement pas été réalisée et Ouest France n’a pas non plus donné suite.

Les débats

Espace oblige, seule une quinzaine de personnes parmi les militants présent sont invitées à prendre place dans la salle d’audience.

Trois nouveaux arrivants se joignent à la liste des parties civiles : « France Nature Environnement », « Sarthe Nature Environnement », et « Bretagne Vivante ».

Les débats débutent finalement à 15h00. La présidente énumère les délits reprochés à l’accusé. La liste est longue. Les lieux de déverse sauvage s’étendent sur sept départements et neufs sites, à travers champs et forêts. Ce n’est plus le Petit Poucet, c’est le saupoudrage généralisé de toute une région.

Puis on aborde le sujet de la protection des salariés sur les chantiers et le débat s’élargit. Les manquements à la sécurité des salariés sont tellement nombreux et flagrants que la présidente, par ailleurs extrêmement pointue sur l’ensemble du dossier, semble presque découragée par cette fastidieuse énumération. On parle de sas de décontamination inopérants, cassés, débranchés ou servant de vestiaires ; d’absence d’humidification et d’aspiration ; d’employés réduits à nettoyer leurs combinaisons à l’aide de bouteilles d’eau minérale qu’ils se versaient sur la tête ; de combinaisons à usage unique réutilisées le lendemain ; de masques en papiers au lieu de masques à cartouches ; de chantiers amiantés protégés d’un simple rubalise…

La présidente évoque aussi des démolitions de bâtiments scolaires, avec « des sacs amiantés qui restent dans l'école, alors que les élèves courent à côté ». Elle a relevé que CDEC était souvent la mieux-disante lors de marchés publics, soupçonnant que cela était lié aux économies faites sur la sécurité. Elle a aussi noté les camions sans bâches transportant des déchets au milieu des habitations, les chauffeurs ignorant tout de la nocivité de ce qu’ils transportaient, les déchets friables - les plus dangereux ! - placés dans des sacs poubelles opaques. "C'est de l'amiante mais c'est pas grave, il n'y a pas de problème" répondait Daniel Couet à ceux de ses salariés qui s’inquiétaient parfois.

Le déroulé des faits, interrompu de temps à autres par les bredouillements de l’accusé tentant de se justifier, dure finalement près de 5 heures.

Les plaidoiries.

A la clôture des débats, la parole est donnée à Maitre Ledoux, dans l’intérêt des parties civiles. Il s’ attache à focaliser son propos sur la mise en danger des salariés de la CDEC, tout en revenant sur les infractions de dépôt illégal de déchets amiantés (notamment chez les agriculteurs) pour répondre par anticipation à la défense et souligner l’inconséquence du prévenu.

A l’issue de la plaidoirie, le Procureur de la République présente ses réquisitions. Après avoir rappelé les précédentes condamnations de Monsieur COUET, il insiste sur les constatations de l’inspection du travail dont les PV sont particulièrement éloquents pour décrire les manquements du prévenu. Ses réquisitions sont relativement sévères puisqu’il réclame une condamnation à 2 ans de prison ferme, ainsi que des peines d’amende à hauteur de :

  • 700 € pour le transport illégal de déchets (contravention de 4ème classe)
  • 6 amendes de 2.000 € chacune pour les autres infractions

Il requiert également que soit prononcée contre Monsieur COUET une interdiction d’exercer dans une activité liée à l’amiante ainsi que la publication du jugement. S’agissant des infractions d’escroquerie et d’usage de faux qui ne nous intéressaient pas en tant que parties civiles, le Procureur ne sollicite pas de condamnation.

La parole est ensuite donnée à la défense qui est assurée par deux avocats. Le premier n’évoque que les manquements relatifs au Code de l’environnement, à savoir l’enfouissement illégal de déchets amiantés et le transport illégal de ces déchets. Quant au second, il présente la défense pour l’ensemble des autres infractions à savoir l’escroquerie, l’usage de faux, les manquements à la réglementation sur l’hygiène et la sécurité au travail et la mise en danger de la vie d’autrui.

Les avocats de Monsieur COUET plaident longtemps sur les infractions d’escroquerie et d’usage de faux, alors même que le parquet n’avait pas requis de peine de ces chefs.

Dans l’ensemble, la défense tente de démontrer que l’instruction avait été bâclée, faisant valoir que les déchets dont il est reproché l’enfouissement n’ont pas fait l’objet d’analyses scientifiques afin de s’assurer de la présence d’amiante. Elle demandé la relaxe pour les infractions au Code de l’environnement, malgré les aveux de son client sur les enfouissements.

Par ailleurs, la défense reconnait l’ensemble des manquements à la réglementation sur l’hygiène et la sécurité au travail en tentant de minimiser leur importance, indiquant que ces manquements ne se sont pas déroulés sur tous les chantiers. La défense cherche ainsi à mettre en garde les juges contre le risque de globalisation et la tentation de généraliser les infractions relevées sur certains chantiers à tous les chantiers confiés à la CDEC.

Sur la mise en danger de la vie d’autrui, les avocats de la défense plaident sans trop de conviction la relaxe, se bornant à soutenir que le risque causé aux salariés n’était pas immédiat. Noëlla et ses anciens collègues apprécieront certainement la nuance.

Sur les intérêts civils, la défense réclame l’annulation des demandes d’indemnisation, arguant principalement du fait que certaines salariées n’étaient que secrétaires (et en cette qualité, pas exposées), et que d’autres n’étaient restés que très peu de temps dans l’entreprise.

Elle présente enfin la situation actuelle de Monsieur COUET qui, à l’issue de sa détention provisoire, a opéré une reconversion dans la peinture, ce qui lui assure désormais de faibles revenus mensuels de 500 à 1.000 €.

Elle plaide finalement pour une peine de prison modérée qui couvrirait tout au plus la période de détention provisoire (4 mois).

A l’issue des plaidoiries, l’affaire a été mise en délibéré et la décision doit être rendue le 2 juin prochain.

Rennes : un "serial pollueur" devant la justice
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