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Actualité de l'Andeva, l'association nationale de défense des victimes de l'amiante et autres maladies professionnelles

Cerdanyola : un petit Casale Monferrato espagnol.

Ce jour-là, Vincente et Julian sont venus témoigner dans les locaux de la coopérative d’avocats « Col-lectiu Ronda ». Ils doivent parler devant la caméra d’une chaine de télévision publique espagnole, avant de rencontrer les représentants de l’Andeva.

Ils ont tous les deux passé de nombreuses années dans l’usine d’Uralita de Cerdanyola et en sont sortis avec une prime de départ inattendue : de l’amiante plein les poumons. Quand Vicente montre l’intérieur de ses bras, de nombreuses traces abrasives rouges apparaissent. Ce ne sont pas des parasites ou des marques de brûlure, mais les signes caractéristiques d’un manque d’oxygène dans le sang. Ce genre de pathologie, significatif des cas graves d’asbestose, on ne les rencontre plus guère en France. Là-bas, elles sont encore monnaie courante, preuve du retard accumulé par l’Espagne dans sa prise de conscience de la dangerosité du matériau cancérogène.

L’histoire du développement industriel de Cerdanyola a débuté en 1907 avec la construction de 12 énormes usines situées en rangées sur 1,5 kilomètre de long. La ville a grandi avec elles et des quartiers entiers ont été construits tout autour. Les rues elles-mêmes ont été construites avec des morceaux d'amiante pour éviter qu’elles ne se transforment en boue. Inévitablement, on pense à Thiant dans le Nord, ou à Casale Monferrato en Italie.

Mais la comparaison s’arrête là. Vicente et Julian se désolent de se sentir si seuls à militer pour que soit clairement désignée la responsabilité de l’amiante dans le malheur qui accable la ville. En attendant, les nombreuses victimes de mésothéliomes s’éteignent presque sans bruit. Contrairement à Casale dont la révolte et le combat contre Eternit sont à présent connus du monde entier, Cerdanyola se tait. Lorsque Julian est allé voir le pneumologue de Cerdanyola, celui-ci a déchiré le diagnostic d’Asbestose pour écrire « Asthme » à la place. Il se souvient que lorsqu’il allait voir le chef du personnel pour se plaindre des conditions de travail chez Uralita, celui-ci sortait son pistolet et le plaçait bien en vue sur la table. Un autre monde…

Même le médecin de la ville, tout acquis aux victimes d’Uralita, se désole de cette apathie. En Espagne, les médecins sont directement salariés de la sécurité sociale et le docteur Tarres qui doit prendre sa retraite à la fin de l’année a demandé à l’institution de pouvoir continuer à suivre les malades de l’amiante bénévolement ; ceci aux fins de pouvoir poursuivre à son échelle la seule étude épidémiologique de cette région.

Au pays de Cervantes, il a souvent eu l’impression de se battre lui aussi contre des moulins à vent.

Pour expliquer ce manque de réaction, on cite la récente décision de la cour de cassation qui a ordonné aux victimes la restitution des indemnisations obtenues en première instance (et confirmées par la cour d’appel). Près de 4 millions d’euros vont devoir être remboursés, avec les intérêts en plus ! Il y a en effet de quoi être sonné…

Plus généralement, on évoque la prise de conscience relativement récente du danger. Il a fallu attendre 2002 pour que l’amiante soit interdite en Espagne, suite à une décision européenne. On parle aussi de la dictature Franquiste qui sévissait encore jusqu’en 1975 ; et de la frénésie de construction qui a suivi sa chute. Il fallait imaginer, construire, moderniser.

Pourtant, les choses avancent. La coopérative d’avocats « Col-lectiu Ronda », spécialisée dans la défense des ouvriers et des causes sociales en général s’est emparée du problème et tente de mobiliser les victimes. A Madrid, Juan Carlos Paul, très inspiré par les exemples français et italiens et présent à Paris en 2012 lors de la conférence internationale organisée par l'Andeva, préside la Fédération des victimes espagnoles qui réunit 12 associations.

Un dossier plus complet sur la situation des victimes espagnoles sera publié dans le prochain bulletin de l’Andeva (septembre 2015).

L'usine URALITA de Cerdanyola, dans la banlieue de Barcelone.

L'usine URALITA de Cerdanyola, dans la banlieue de Barcelone.

Stalactite d'amiante
Stalactite d'amiante
Stalactite d'amiante
Stalactite d'amiante
Stalactite d'amiante

Stalactite d'amiante

Les ouvrières d'Uralita dans les années 60.

Les ouvrières d'Uralita dans les années 60.

Une partie de l'équipe juridique et administrative de la coopérative d'avocats "Col-lectiu Ronda"

Une partie de l'équipe juridique et administrative de la coopérative d'avocats "Col-lectiu Ronda"

Vicente Jimenez et Julian Del Amo Ochoa , anciens d'Uralita et victimes de l'amiante.

Vicente Jimenez et Julian Del Amo Ochoa , anciens d'Uralita et victimes de l'amiante.

Dans les locaux de Col-lectiu Ronda à Cerdanyola.
Dans les locaux de Col-lectiu Ronda à Cerdanyola.
Dans les locaux de Col-lectiu Ronda à Cerdanyola.
Dans les locaux de Col-lectiu Ronda à Cerdanyola.
Dans les locaux de Col-lectiu Ronda à Cerdanyola.

Dans les locaux de Col-lectiu Ronda à Cerdanyola.

Le docteur Tarres

Le docteur Tarres

Etudes épidémiologiques régionales.
Etudes épidémiologiques régionales.
Etudes épidémiologiques régionales.

Etudes épidémiologiques régionales.

De gauche à droite : Hélène Boulot (Andeva), Marta Berrera et Raquel Lafuente de la Torre (Col.lectiu Ronda), deux salariés de Federal Mogul et membres de l'association des victimes de Bart,  Juan Carlos Paul (président de la Fédération des victimes), Alessandro Pugno (Afeva, organisateur de la rencontre).

De gauche à droite : Hélène Boulot (Andeva), Marta Berrera et Raquel Lafuente de la Torre (Col.lectiu Ronda), deux salariés de Federal Mogul et membres de l'association des victimes de Bart, Juan Carlos Paul (président de la Fédération des victimes), Alessandro Pugno (Afeva, organisateur de la rencontre).

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