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Actualité de l'Andeva, l'association nationale de défense des victimes de l'amiante et autres maladies professionnelles

Pénal : un article de Médiapart apporte de nouveaux éléments accablants.

La cause semblait entendue depuis déjà quelques mois. Les juges du pôle de santé publique n’en faisaient guère de mystères et les non-lieux s’apprêtaient à pleuvoir sur ce qu’on nomme le grand dossier pénal de l’amiante.  Saoulé de coups bas, celui-ci semblait destiné à disparaitre sans grand fracas sous les derniers assauts d’une justice impitoyable. Mais voilà qu’un article rédigé par la journaliste Eliane Patriarca sur le site Mediapart l’a remis sur le devant de la scène en apportant le témoignage accablant de Jean Michel Sterdyniak, désigné pour rédiger un rapport d’expertise sur le dossier pénal de Claude Raffaelli, ancien médecin du travail des usines Ferrodo-Valeo de Condé sur Noireau.

Lui-même médecin du travail en Seine Saint Denis, Sterdyniak avait engagé son travail en 2010 quand Odile Bertella-Geffroy instruisait le dossier au pôle de santé publique de Paris. Sommé en 2012 par les nouvelles juges du pôle de faire rapport commun avec Françoise Conso, autre experte avec laquelle il se dit en désaccord sur à peu près tout, il réalise très vite que les dés sont pipés et l’affaire déjà jouée. En premier lieu, les juges leur demandent de ne pas s’appesantir sur le CPA alors que « les archives montrent clairement qu’il (Claude Raffaelli) était la caution médicale du lobby industriel.»

L’article de Médiapart met pourtant en lumière de nombreux exemples des actions du médecin en faveur de l’organe de lobbying des industriels de l’amiante. Notamment en 1991, lorsqu’il intervient auprès du professeur Brochard, pneumologue également membre du CPA, pour le convaincre de ne pas publier un article qu’il juge « trop critique », «  trop sévère » sur la contamination par l’amiante des ouvriers du bâtiment. « Il faut soutenir l’usage contrôlé de l’amiante… comme le fait le CPA. », lui écrit-il à cette occasion. Le contre rapport commandé par l’Andeva à la médecin de travail Marie Pascual met lui aussi en lumière nombre de faits accablants qui montrent comment Claude Raffaelli a continuellement violé les obligations qui tenaient à sa fonction de médecin du travail.

Lorsque la juge convoque les trois  experts entre 2015 et 2016, c’est d’abord pour leur demander de se presser afin d’être payés, car dit-elle : « l’affaire n’ira pas plus loin, il n’y aura pas de procès ». Lors du second entretien elle confie « ne pas comprendre pourquoi le docteur Raffaelli a été mis en examen ». Durant le troisième, elle enfonce le clou en affirmant que « toute l’enquête a été menée à charge ».

Désabusé et malade, Jean Michel Sterdyniak se retire de l’expertise. « Si j’avais eu le moindre espoir que ce rapport serve à quelque chose, j’aurais probablement trouvé un moyen de terminer la rédaction », reconnait-il. 

Lorsqu’il avait été contacté par Odile Bertella-Geffroy en 2010, il était persuadé que l’accusation portée contre le médecin de Condé sur Noireau était « excessive ».  Aujourd’hui, il ne lui trouve aucune circonstance atténuante. « Claude Raffaelli n’a absolument pas joué son rôle de médecin du travail », estime-t-il sur la foi des nombreux documents qu’il a eus entre les mains. Il se dit « effaré,  choqué par ce collègue qui assiste à une hécatombe parmi les ouvriers dont il a la charge sans réagir, sans hurler, sans péter un câble ».     

A la lumière de ce témoignage accablant qui met en lumière une instruction exclusivement menée à décharge, l’Andeva a demandé à ses avocats de préparer une requête aux fins de récusation des juges du pôle judiciaire de santé publique auprès de la première présidente de la Cour d’appel.

Celle-ci a été déposée dans les jours suivant la parution. 

Vous trouverez en annexe de cet article, le communiqué de presse Andeva du 20 février 2018, et l'article de Médiapart du 19 février 2018.

L'ancien local de Claude Raffaelli à Condé sur Noireau.

L'ancien local de Claude Raffaelli à Condé sur Noireau.

Vincennes, le 20 février 2018

COMMUNIQUE DE PRESSE

À LA SUITE DES RÉVÉLATIONS DE MÉDIAPART,

L’Andeva demande la récusation des juges
d’instruction du pôle judiciaire de santé publique

L’ANDEVA a pris connaissance de l’article de Médiapart paru ce jour qui démontre que les magistrats du pôle judiciaire de santé publique n’ont instruit les affaires amiante qu’à décharge, en cherchant par tous les moyens possibles à boucler rapidement leurs dossiers et à rendre des non-lieux.

En juillet 2017, les victimes de l’amiante ont découvert l’intention des magistrats instructeurs, appuyés par le parquet de Paris, de rendre un non-lieu généralisé sur tous les dossiers amiante en faisant une interprétation totalement contraire au contenu d’un rapport d’expertise scientifique commandé quelques mois plus tôt par ces mêmes magistrats. Dès lors, l’Andeva a éprouvé de sérieux doutes sur la qualité de l’instruction et sur le respect par les juges de l’article 81 du Code de procédure pénale d’instruire à charge et à décharge.

Aujourd’hui, avec les révélations de l’enquête de Médiapart, le doute n'est plus permis.

Elles concernent  une seconde expertise ordonnée par les magistrats sur l’action de l’un des acteurs clé de l’affaire, le Dr. Claude Raffaelli, médecin du travail dans les usines de transformation d’amiante de Condé-sur-Noireau et membre du Comité permanent amiante (CPA, structure de lobbying chargé de défendre le matériau malgré ses dangers). La manière dont les magistrats ont fait pression sur les experts est édifiante.

Il est maintenant évident que cette instruction a été menée exclusivement à décharge, que les magistrats du pôle judiciaire de santé publique se sont ingéniés à détricoter toutes les charges qui pesaient sur les principaux protagonistes de l’affaire.

Dans ces conditions, l’Andeva a demandé à ses avocats de préparer une requête aux fins de récusation des juges du pôle judiciaire de santé publique auprès de la première présidente de la Cour d’appel. Celle-ci sera déposée dans les tout prochains jours.

 

Cliquez ci-dessus pour lire l'article de Médiapart

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