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Actualité de l'Andeva, l'association nationale de défense des victimes de l'amiante et autres maladies professionnelles

Anxiété : salariés et retraités se mobilisent autour de l'usine Saint-Gobain de Thourotte.

Ce mercredi 30 octobre, la salle St Gobain du cinéma municipal de Thourotte s’est remplie de plus de 110 personnes venues participer à la conférence-débat organisée par le Collectif Amiante du site local de St Gobain, collectif créé il y a 6 ans par des militants retraités du site. Parmi les soutiens de cette initiative, on pouvait compter la fédération Verre Céramique de la CGT (représentée par son secrétaire général, mais aussi des représentants de l’usine Saint-Gobain d’Aniche, de Owens Illinois à Puy Guillaume, d’Arc International) l’Andeva et l’Ardeva Picardie. Les participants étaient venus protester contre la remise en cause par St Gobain de l’indemnisation du préjudice d’anxiété gagnée par 128 salariés du site.

 

Signée par ces 4 organisations, un appel à participation avait été lancé à toute la population de la région de Noyon-Compiègne-Thourotte pour dénoncer les pressions exercées par les dirigeants de St Gobain sur les pouvoirs publics et sur la justice.

 

En effet, non contents d’avoir empoisonné impunément des centaines et des milliers de travailleurs en France et dans le monde par la production ou l’utilisation de l’amiante dans ses sites de production, les dirigeants de St Gobain font appel de leur condamnation par les Prud’hommes à indemniser le préjudice d’anxiété des 128 de Thourotte. Par ailleurs, le dossier d’ouverture du droit à la préretraite amiante (l’ACAATA) pour le site de Thourotte est actuellement bloqué dans les tiroirs du ministère du Travail. Déposé il y a 13 mois, ce dossier très minutieux, construit par les animateurs du collectif amiante, avait pourtant reçu un avis favorable de la Direction du travail des Hauts de France.

 

Saint-Gobain, à Thourotte, ce sont deux usines dans la même enceinte : un « float » qui produit du verre plat en continu, et une usine de transformation (Sekurit) qui fabrique ensuite des vitrages pour l’automobile ou l’aéronautique. Deux usines « du feu », où l’amiante a été utilisée pendant des décennies dans le calorifugeage, les vêtements de protection, sur les machines, etc… sans qu’aucune information soit donnée aux salariés sur les dangers pourtant connus des directions, et sans protection.

 

Après une présentation du collectif et du déroulé par le président du collectif, Jean-Claude Patron, plusieurs interventions ont introduit la partie Questions-Réponses de la conférence.

 

Maître Elisabeth Leroux a fait le point sur l’appel formulé par St Gobain contre l’indemnisation du préjudice d’anxiété accordé par les Prud’hommes : une première depuis que la Cour de Cassation a ouvert ce droit aux salariés exposés dans des sites non admis à la préretraité amiante. Au-delà de cette première vague de 128 plaignants victorieux, une seconde vague de dossiers est en préparation pour une deuxième saisine du conseil des prud’hommes.

 

Maître Macouillard, du même cabinet TTLA, mais plus spécialisé sur les dossiers d’ouverture du droit à la préretraite amiante, a souligné la qualité du dossier de l’établissement de Thourotte construit par les animateurs du Collectif. Fort de l’expérience du cabinet sur les dossiers d’autres sites, il a rappelé que les décisions de classement prises par les Ministères ont aussi un versant politique. Certes, les verreries admises à l’ACAATA sont rares en France, mais les tribunaux administratifs ont déjà accordé ce droit aux verreries de Masnières (59) et à la cristallerie de Baccarat (57)

Bernard Balestri, représentant du groupe de travail de l’Andeva sur l’ACAATA, a tout d'abord salué le travail accompli par le Collectif Amiante. Reprenant l’exemple des Fonderies du Poitou, il a décrypté les méthodes employées par la Direction Générale du Travail pour minimiser le caractère significatif des activités de calorifugeage de certains sites, quitte à désavouer le travail des inspections du travail locales, alors qu’elles ont totalement respecté le caractère contradictoire de leur enquête.

 

Le représentant de l’Andeva a rappelé le rôle éminent joué par les Directions de Saint-Gobain dans les basses besognes du Comité Permanent Amiante, visant à garantir coûte que coûte l’écoulement de ses productions de produits amiantés (de ses mines du Brésil jusqu’aux tuyaux et plaques d’Everite) et retarder l’interdiction de l’amiante jusque 1996. Saint-Gobain et les cabinets ministériels, c’est une histoire d’amour qui se moque de la couleur politique des gouvernements. Alors oui, pour lui, le blocage du dossier de préretraite amiante du site de Thourotte est probablement politique. Oui le dossier anxiété est un coup dur pour l’image de marque du trust St Gobain ! Oui les actions du collectif amiante et des salariés du site pour dénoncer la politique de St Gobain auprès des médias et de l’opinion publique tape juste. Et l’action de ce jour, combinant débat et rendez-vous aux portes de l’usine est un bel exemple pour la profession et pour les autres sites de France en butte aux décisions de rejet du Ministère. Un dernier mot est ajouté sur l’importance du suivi médical amiante pour tous, qu’on soit actif ou qu’on soit retraité.

 

Le secrétaire de la fédération verre-céramique de la CGT a déploré le caractère encore trop éclaté de précédentes luttes autour de la santé au travail et des produits dangereux. Il a appelé à mieux fédérer les combats sur le terrain (amiante, temps de travail, 6ème équipe, nanomatériaux, etc..) et fait écho à la 3ème conférence organisée par les verriers de Givors les 14 et 15 novembre 2019 sur le thème : « Du travail au lieu de vie : quelles mobilisations contre les risques professionnels et les atteintes à l’environnement ? »   

 

Marcel Lagant, Président de l’ARDEVAP, a insisté sur la prévention du risque amiante qui passe notamment, dans les 3 départements couverts par l’association, par l’élimination de tous les dépôts sauvages de matériaux amiantés. Des voies d’élimination sont citées. Marcel a aussi rappelé que l’ARDEVAP, comme l’Andeva, peuvent apporter un soutien pour d’autres maladies professionnelles que celles provoquées par l’amiante, comme par exemple les silicoses.

 

Le débat qui a suivi ces interventions a tourné autour des dossiers anxiété et notamment des arguments trompeurs avancés par Saint-Gobain à l’encontre de chaque plaignant, de la lenteur opposée au dossier pour la préretraite amiante, de l’opposition du médecin du travail du site à la transmission des éléments des dossiers médicaux et des obstacles rencontrés pour obtenir le suivi post-professionnel amiante et de l’aide que peut apporter le collectif en la matière.

 

Après deux heures d’échanges, les participants se sont rendus aux portes de l’usine où un piquet de grève bloquait déjà une longue file de camions, dans le but de faire avancer des revendications de salaire et la réparation des expositions fautives à l’amiante. Malades et non malades de l’amiante, anciens et actifs des deux usines se sont retrouvés pour fraterniser autour d’un grand barbecue.

 

Ce 30 novembre a marqué un pas en avant vers l’unité nécessaire entre salariés actifs, retraités, syndicats et associations de défense pour faire avancer les droits à la réparation la plus complète possible de l’empoisonnement subi dans les verreries.

 

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