Actualité de l'Andeva, l'association nationale de défense des victimes de l'amiante et autres maladies professionnelles
Virginie Dupeyroux est membre de l'Adeva Centre. Elle a écrit un livre intitulé "Amiante et mensonge : notre perpétuité". Elle nous raconte comment et pourquoi elle a entrepris la réaction et comment elle accompagne la vie de ce livre qui lui permet de témoigner au nom de son père empoisonné par l'amiante à Aulnay Sous Bois.
Virginie, peux-tu nous parler de la genèse de ce livre ?
L’idée m’est immédiatement venue quand mon père est décédé. Parce que je ne voulais pas qu’il soit mort pour rien. Je le voyais prendre des notes tout le temps, donc je savais qu’il écrivait son ressenti vis-à-vis de sa maladie au jour le jour. Il parlait d’une aventure avec son corps.
Je savais qu’il avait ces notes et quand il est parti, il m’a dit « il faut que tu fasses cesser cet Etat de non droit ». Ce sont ses mots.
Au milieu de tout ça, il y avait la compréhension de l’origine de sa contamination qui l’avait stupéfait. S’il n’y avait pas eu cet article dans le Parisien du 26 novembre 2014, on n’aurait jamais compris ce qui nous arrivait. En premier page, le parisien titrait « Empoisonnés sans le savoir ». A l’intérieur, on découvrait l’histoire du CMMP d’Aulnay-Sous-Bois qui a empoisonné une population installée autour de trois écoles pendant des décennies. Et là, on a compris ce qui nous arrivait. Car mon père avait reconstitué son parcours professionnel et il ne voyait pas où il aurait pu être contaminé, sauf de manière très épisodique. Cela nous a permis de comprendre aussi ce qui était arrivé à sa maman qui était décédée d’un mésothéliome 37 ans auparavant. Cet article a vraiment changé notre vie.
Et comment as-tu travaillé pour la rédaction ? Est-ce uniquement à partir de notes de ton père ?
De mon côté, j’ai surtout échangé avec une dame qui s’appelle Rachida, qui est comme ma tante. Elle était aussi riveraine du CMMP. Je l’ai tenue au courant de la situation au quotidien pendant 15 mois. C’est à partir de ces échanges que j’ai écrit ma partie du livre, en revenant sur des souvenirs qui étaient restés très précis et qui le sont restés six ans après. C’est seulement plus tard que j’ai pu replonger dans les notes de mon père. Cela a donné un carnet de bord à deux voix.
Je dis toujours que je suis devenu écrivain par nécessité, pour faire savoir. Rien ne me préparait à ça. J’ai seulement pris conscience de l’impact que ce témoignage pouvait avoir avec un article de Charlie Hebdo où Fabrice Nicolino que j’aime beaucoup m’a fait un compte rendu très élogieux. Je me suis dit que peut-être ce que j’avais écrit valait la peine d’être lu par des personnes qui n’étaient pas directement concernées. Par la suite, j’ai fait une cinquantaine de séances de dédicaces et de conférences.
Par la suite, tu as décidé de changer d’éditeur…
Oui, car je ne me sentais pas assez soutenue. J’ai raté quelques évènements auxquels j’aurais dû participer. Puis j’ai rencontré celui qui allait devenir mon nouvel éditeur à la Fête de l’Humanité Bretagne en 2019. Je suis repartie pour une nouvelle aventure avec deux chapitres supplémentaires qui font le bilan des trois années passées en conférence à travers toute la France.
C’est une petite maison d’édition. Nous allons imprimer un nombre d’exemplaire suffisants pour répondre aux dates de conférences prévues. Nous avons également édité un bon de souscription qui permettra à ceux qui le souhaitent le recevoir à tarif préférentiel (voir en bas de page). Je précise que tous les bénéfices seront, comme pour la précédente édition, distribué entre les trois associations dont je suis membre et qui travaillent sur ces questions.
Justement, peux-tu nous parler de votre engagement associatif ?
Je suis membre de Ban Asbestos France et de l’Adeva Centre. J’ai rencontré Serge Moulinneuf deux semaines après le décès de mon père. Il m’a réconforté et m’a expliqué que mon histoire n’était malheureusement pas rare et que dix personnes par jour en France la vivaient. Je lui ai proposé de rejoindre l’association pour aider à ma façon. Maintenant nous faisons des interventions ensemble dans toute la région Centre. J’adhère aussi à l’association Henri Pezerat grâce à laquelle je découvre des scandales sanitaires dont je n’avais jamais entendu parler.