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Le blog de l'Andeva

Thourotte : après le classement "amiante" du site, faire cesser le cynisme de Saint-Gobain.

9 Avril 2024, 15:13pm

D'après un article de l'Oise Hebdo du 29 mars 2024

Il y avait à la fois une ambiance de fête, de célébration, à l'assemblée générale du collectif amiante de Thourotte, et un goût d'amertume.

Ambiance de fête parce que ce vendredi 29 mars au matin, les bénévoles du collectif, salariés, syndicats de retraités et d'actifs de la CGT - syndicat qui a porté le combat de l'amiante à Thourotte pendant 15 ans — se sont d'abord bien sûr félicités de la victoire obtenue le 7 mars avec la Validation par le tribunal administratif du classement « site amiante » des usines Saint- Gobain Glass et Sekurit de Thourotte. L'avocate du collectif l‘a confirmé aux actifs et retraités des usines : « Le dossier est aujourd'hui clos ». Une victoire qui offre, au travers de différents dispositifs, indirectement ou directement, la possibilité de partir en retraite plus tôt, de percevoir des indemnités et de bénéficier d'un suivi médical spécifique. « C‘est une victoire de la solidarité », s'est félicité le représentant départemental de la CGT, notant, chose rare, que sur ce dossier, « les syndicats des retraités et des actifs » avaient travaillé de concert autour du comité.

Jean Claude Patron, l'une des chevilles ouvrières du collectif, cégétiste depuis toujours, et ancien de Saint-Gobain Thourotte, s‘est lui permis un historique du combat mené officiellement depuis 15 ans au sein de l'association, officieusement depuis les années quatre-vingt-dix lorsque l'amiante a commencé à faire parler de lui.  « La difficulté pour faire reconnaître le site, a-t-il rappelé, c'est que contrairement à Fédéral Mogul (fabrication de plaquettes de frein, à Crépy-en- Valois) ici, l'amiante n'était pas une matière première ». Avec de l’amiante utilisé ici principalement en tant que matériau d'isolation, « il a fallu prouver que 25 % des effectifs avait participé à des travaux en lien direct avec le matériau.

Une ambiance de victoire, mais un goût amer donc dans une assemblée où il a été demandé de ne pas oublier des milliers de victimes de l'amiante partout en France, et plus largement les 44.000 maladies professionnelles reconnues chaque année ou les quelque 700 accidents du travail mortels annuels. Une assemblée où aussi le cynisme de Saint-Gobain a été dénoncé une nouvelle fois par Jean-Claude Patron qui se souvient que Iors des premières alertes, les médecins de l'usi ne niaient devant les malades les effets de l’amiante. « C'est tout juste s'ils ne nous disaient pas qu'on pouvait en manger », ironise-t-il.

Aujourd'hui, avec le classement du site et les procédures d'indemnisation, la hache de guerre entre les syndicats et la direction est-elle enterrée ? Pas tout à fait. De nombreux salariés ont encore témoigné ce vendredi de la difficulté d'obtenir lors de leur départ de l'entreprise l'attestation signifiant qu’ils ont été en contact avec l'amiante. Alors qu'en théorie la reconnaissance « amiante » doit faciliter la 3ème vague de dossiers « anxiété », l'entreprise rechigne encore trop souvent à délivrer ces attestations. « Saint-Gobain fajt preuve de mauvaise volonté, c'est peu de le dire », a estimé l'avocate de collectif, issue du cabinet TTLA, spécialisé dans le droit du travail. Elle promet de solliciter l'entreprise dans les prochaines semaines. « Et si nous n'avons pas de réponse ou des réponses négatives, nous saisirons le juge de l'exécution pour les mettre en demeure », assure-t-elle. Dans un tel scénario, « des dommages et intérêts seront demandés, car ces retards entraînent des retards dans le suivi médical et une perte de chance ».

De quoi faire écho à ces mots prononcés par Alain Bobbio, secrétaire national de l’Association Nationale de Défense des Victimes de l'Amiante (Andeva) qui a travaillé avec le collectif sur toutes ces procédures : « Il y a une volonté aujourd'hui de tout le monde de tourner la page amiante, mais pour nous ce n'est pas du passé : chaque semaine, nous voyons des personnes qui nous disent, "j'ai ceci", "j'ai cela" : le nombre de mésothéliomes (cancers de la plèvre, NDLR) ne diminue pas, il est constant ». Et ce ne sont pas les différents appels formés lors des procédures par le ministère du Travail, appuyée par Saint-Gobain, qui lui donneront tort quant à la volonté « d’enterrer la question de l'amiante ».

Le combat va donc se poursuivre pour le collectif qui prépare une troisième vague de procédures « anxiété » avec déjà une centaine de dossiers bouclés. Jean-Claude Patron continue toutefois d'appeler au recensement des personnes concernées : « Aujourd'hui, les anciens salariés qui étaient en CDD, en intérim, sous-traitants ou stagiaires, peuvent y avoir droit, mais ils sont disséminés dans la nature ». Pour eux, la démarche à suivre est simple : contacter le collectif amiante de Thourotte et se joindre aux procédures collectives.

 

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