Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de l'Andeva

Marianne : le bombe a retardement de l'amiante

3 Février 2020, 16:15pm

Dans son édition de vendredi dernier, le magazine Marianne, revient sur l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen et spécialement sur le versant « amiante » de cette catastrophe. Les journalistes Jean-François Jaillette et Jean-Louis Thillier s’interrogent sur les effets que les millions de fibres d’amiante projetés sur des kilomètres à la ronde pourraient avoir sur la santé des habitants de la région.

 

Cela commence par le récit de l’incendie et les inquiétudes des pompiers au moment du désastre. On découvre, par exemple, que ceux-ci, ignorant encore ce que contenaient les fûts qui explosaient, ont bien failli manquer d’eau au pire moment, le « réseau propre à l’usine obligatoire pour un établissement de ce type s’étant brutalement effondré ».

 

Ce n’est pourtant qu'ensuite, nous disent-ils « que débute une autre catastrophe, plus discrète et plus sourde car invisible, mais tout aussi angoissante que l’incendie initial ».

 

Les auteurs nous emmènent alors deux jours plus tard, dans le jardin de Florence Carré, une habitante du quartier de St-Gervais situé à 2,5 km de l’usine. Celle-ci y a découvert de curieux cailloux gris plats et dentelés dont elle soupçonne la nature. En effet, quelques instants plus tôt, elle a entendu le préfet à la radio quand celui-ci évoquait l’effondrement du toit de l’usine, au total 8000 m2 de fibrociment composé pour 12 % d’amiante en moyenne. Elle place aussitôt les cailloux suspects sous son microscope moléculaire et identifie le matériau cancérogène.

 

Si Florence Carré ignore encore certains détails essentiels sur la réelle toxicité de l’amiante, elle va vite se renseigner et apprendre dans la documentation scientifique que « la toxicité de l’amiante présente une caractéristique particulière qualifiée de « stockastique ». Cela signifie qu’indépendamment de la dose et de la durée d’exposition, les fibres peuvent provoquer un cancer spécifique du poumon, le mésothéliome. »   

 

Florence Carré raconte : « dans mon jardin, j’ai ramassé une trentaine de fragments, certains compacts, d’autres à l’état de pelotes de fibres. Certains visibles, d’autres enfouis sous les haies, certains brûlés, issus d’une cloison ou du sol du hangar, la plupart en fibrociment. »       

 

Aidée par Thierry Guyader, un des responsables de l'Adeva locale, elle alerte ses voisins dont certains découvrent des fragments de plus de 15cm. « Sur le trottoir d’une rue avoisinante, se souvient-elle avec émotion, un fragment était soudé au bitume tant sa température était élevée quand il est tombé ». On imagine ce qui aurait pu se passer s’il était tombé sur un passant !    

 

Comment expliquer que ces fragments aient pu atterrir si loin de leur point d’origine. Les journalistes l’expliquent avec beaucoup de précision : « sous l’effet de la chaleur, les poutrelles métalliques soutenant le toit ont fondu, provoquant son effondrement sur les fûts entreposés en dessous. Lorsque ces derniers ont explosé telles des bombes chauffées à blanc, le souffle énorme a projeté des millions de fragments dans le nuage de fumée ».  

 

Le lendemain, Florence découvre, atterrée, dans les premiers communiqués officiels que « l’usine n’a pas explosé, vous ne pouvez pas avoir trouvé d’amiante sur votre pelouse » ! Cela ne l’empêche pas, avec l’aide de quelques voisins, de transmettre leurs informations à Paris Normandie. Grace aux 500 flyers distribués dans les boites aux lettres environnantes, ils réalisent une « carte des retombées ». On y découvre que des fragments ont été découverts jusqu’à 25 km de l’usine !

 

Selon les propos toujours officiels, les analyses faites quelques jours plus tard ne montrent aucune présence d’amiante dans l’air. Or, selon le fondateur du laboratoire An-Diag, « les mesures ont été faites trop tard et après le passage de pluies abondantes ».  

 

« L’attitude des pouvoirs publics est irresponsable, s’indigne Florence Carré. Quand je vois des habitants utiliser un souffleur de feuilles, je ne peux m’empêcher de penser à toutes les particules d’amiante qu’ils sont en train de soulever et de respirer. Que se passera-t-il au printemps prochain quand ils passeront les tondeuses ? »    

 

Le dossier précis et détaillé réalisé par Jean Claude TAILLETTE et Jean-Louis THILLIER est à lire en totalité dans le magazine MARIANNE daté du 31 janvier au 6 février 2020. Nous vous invitons à vous le procurer.    

   

 

Commenter cet article