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Le blog de l'Andeva

Renault Trucks : l'Aper dénonce une indemnisation illisible et inégale

15 Avril 2021, 10:50am

Jean-Paul Carret lors de l'audience de mars 2019.

Le procès « anxiété » géant débuté le 12 mars 2019 à l’espace 140 de Rilleux-la -Pape a connu une étonnante conclusion ce jeudi 8 avril. Chacun des 1 200 jugements correspondant aux plaignants de l’usine Renault Trucks exposés à l’amiante entre 1964 et 1996 ont été envoyés un par un, à chaque plaignant, et les décisions semblent très contrastées. Il faudra plusieurs jours aux élus de l’Aper et à leur avocat pour en brosser un tableau complet. On sait d’ores-et-déjà que 666 dossiers ont été déboutés et que 474 autres ont obtenu réparation, mais d’une manière très inégale.
     

Au terme du départage du 8 avril, il y a de la satisfaction d’avoir été entendu pour certains, la colère d’avoir été déboutés pour d’autres, mais il y a surtout l’incompréhension pour la plupart d’entre eux, au premier rang desquels les dirigeant de l’APER et l’avocat de l’association, Cedric de Romanet du cabinet TTLA. « La magistrate s'assied gentiment sur la jurisprudence de la Cour de cassation » constate-t-il, en tout en rappelant qui rappelle que le classement amiante du site emporte automatiquement avec lui la présomption d'exposition de l'ensemble des salariés ayant travaillé aux périodes où l'amiante était utilisé dans l'établissement.

Les écarts très importants d'indemnisation dans les dossiers où Renault Trucks a été condamné laissent également l'avocat songeur. « Seuls 100 salariés ont obtenu 10 000 euros d'indemnisation... les autres sont tous en dessous. L'un d'eux a même reçu 200 euros », pointe maître Cédric de Romanet, qui de son côté demandait 15 000 euros pour chacun des plaignants. Au total, la justice ne leur aura donc accordé que 3,8 millions d'euros sur les 18 millions demandés.

Il semble donc que les juges aient été sensibles aux arguments de la défense de Renault Trucks qui avait plaidé pour l'individualisation selon les lieux et les carrières afin de restreindre le périmètre et minimiser le montant total des indemnisations à verser. On se souvient aussi qu’au court de l’audience originelle du 12 mars 2109 (voir l’article du blog correspondant http://andeva.over-blog.com/2019/03/aper-une-audience-xxl-pour-les-anciens-de-renault-trucks.html), l'avocate de l'entreprise n'avait cessé de minorer l'ampleur de la présence d’amiante sur cet immense site recouvrant quasiment 80 hectares. S'appuyant sur l'idée que seuls deux secteurs avaient conduit au classement du site, ignorant volontairement les nombreuses maladies et décès recensées dans d’autres parties de l’usine, celle-ci avait dénié la réalité de l'exposition des anciens salariés affectés sur d'autres postes.


A première vue, les indemnisations accordées semblent donc se concentrer sur des employés qui travaillaient dans ces deux secteurs incriminés : les activités autocar/autobus et la fonderie. « La juge a décidé de ne rien donner à des gens qui ont bouffé de l'amiante pendant des années, y compris dans des secteurs comme la forge ou le traitement thermique où les ouvriers travaillaient dans des conditions pas possibles. Les employés de bureau et les techniciens sont ignorés de la juge alors que tous se rendaient aux ateliers ou les traversaient dans le cadre de leur travail. Sans parler de leurs bureaux ou l’amiante était présent partout.  Il y a une incohérence phénoménale dans cette décision », dénonce Jean-Paul Carret, président de l’APER. « Maintenant, il faut que l'on étudie chacun de ces jugements. C’est un travail gigantesque qui va nous demander le reste de la semaine », précise Jean-Paul, qui a œuvré depuis 2016 et le classement amiante de l'usine de Vénissieux pour monter les dossiers.

« On verra ce qu'il en ressort véritablement, mais on aura toujours la possibilité d'interjeter appel si nécessaire » conclut-t-il. Car si la décision de faire appel appartient à chacun des plaignants, il est fort probable qu'ils seront nombreux à saisir à nouveau la justice.

Le 27 avril sera rendu le délibéré des 200 derniers dossiers restant sur les plus de 1 400 déposés au total. Ces plaintes avaient fait l'objet d'un procès le 13 octobre. Si comme pour les 1 200 premiers dossiers, le tribunal ne tranche pas, il sera alors fait appel à un juge départiteur. Histoire à suivre de près, donc.


 

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